Développement durable
« Ne vous inquiétez pas si cela vous met en retard », Thomas L. Friedman
Si l’on devait faire un logline comme dans un pitch, ce livre se résumerait en ceci: « Pour survivre dans notre monde aujourd’hui, il nous faut retourner à nos sources authentiques et y puiser l’inspiration nécessaire pour lier des relations de confiance, socle de tout développement personnel et collectif. »
C’est un livre qui scanne les problèmes contemporains partant de grandes puissances comme les USA en passant par de petits États tout aussi déstabilisés que les premiers par la vitesse à laquelle va le développement technologique.
Thomas L. Friedman, auteur du livre, a dû puiser dans son enfance à St. Louis dans le Minnesota la quintessence de ce livre: renouer avec la confiance envers le voisin, l’inconnu. Et comment faire naître cette confiance tant qu’on reste cloisonné chez soi, barricadé par nos stéréotypes!
Son message est limpide: laissons un chouïa nos téléphones, smartphones, ordinateurs... sortons, échangeons, dînons, partageons un repas ensemble, un sourire.
On crée ainsi une relation de confiance, base de tout développement et de toute entraide à l’ère du terrorisme.
Au-delà des disparités, il y a de l’humanité en chaque communauté et en chaque homme. Il ne faut pas fermer les yeux sur les défis (par exemple la faible capacité à s’adapter au développement de la supernova ou iCloud). Le terrorisme féconde et naît souvent dans l’indifférence totale de l’autre, même allogène.
« L'utopie africaine consiste à frayer d'autres chemins du vivre ensemble », Felwine Sarr, économiste sénégalais
La manière de concevoir le développement peut différer d’une entité sociale à une autre, d'un continent à un autre. C’est ce que nous allons tenter de découvrir en essayant d’appréhender la notion du développement dans le continent africain.
L’Aperçu du niveau de développement de l’Afrique
Les pays du Sud, particulièrement les moins développés, « sont devenus les victimes plutôt que les bénéficiaires de la globalisation de l’économie mondiale » … et « l’interdépendance a rendu leurs fragiles économies hautement vulnérables aux changements des conditions économiques mondiales… », à en croire Maurice Strong.[1] Le continent africain n’échappe pas à cette logique.
Deni Cogneau dans l’ouvrage collectif intitulé 27 questions d’économie contemporain et dirigé par Philippe Askenazy et Daniel Cohen [2008] donne une description caractérisée de l’Afrique Subsaharienne dont la plupart sont des anciennes colonies françaises :
"L’Afrique subsaharienne est le sous-continent le plus pauvre de la planète, de même que celui où la croissance du niveau de vie est la plus faible depuis vingt ans. Il s’agit aussi du continent dont les nations sont les plus récentes et où la population est la plus jeune […] Par ailleurs, l’originalité des structures familiales, des relations de parenté et des règles de succession continue de faire apparaître les sociétés africaines comme particulièrement étranges à l’œil occidental ou même asiatique. [Denis Cogneau in Philippe Askenazy, Daniel Cohen, 2008]"[2]
Denis C. rappelle également que l’Afrique constitue la région la plus pauvre du monde et où les inégalités en ce qui concerne les revenus sont les plus élevées, dans et entre pays différents : « Un Africain moyen consomme deux fois moins qu’un Asiatique, quatre fois moins qu’un Latino-Américain, huit fois moins qu’un Européen […] et seize fois moins qu’un Nord-Américain ».[3] Les inégalités sur ce continent seraient aujourd’hui la source de violences économiques, sociales et politiques et aussi à l’origine d’une mauvaise allocation des ressources qui handicapent ainsi le développement, conclut Denis Cohen [2008]. Dans un tel contexte, le développement pourrait être une chimère. Et il semble difficile d’ailleurs d’évoquer le développement en Afrique avec sérénité ou tout simplement de parler de l’Afrique, tant les données divergent d’un pays à un autre, comme l’appréhende Christine Lagarde, directrice générale du Fonds Monétaire International (FMI), dans une interview donnée par le journal Jeune Afrique, le 21 février 2017 :
Nous voyons des perspectives d’amélioration en 2017 et en 2018 qui n’existaient pas en 2016. Mais nous n’allons pas revenir aux taux de croissance d’avant la crise, quand on se réjouissait de « l’essor africain ». Cela m’embarrasse toujours de parler de « l’Afrique », car il n’y en a pas une, mais 54. Il y a des pays francophones et anglophones, côtiers ou enclavés, ceux qui sortent de conflits et ceux qui sont avancés dans le domaine de leur reconstruction et de leur sécurité, des producteurs-exportateurs de matières premières et des importateurs, etc. En fait, il s’agit d’une mosaïque de développements économiques dans laquelle on a constaté une grande diversité de croissances, même dans les années qui ont précédé la crise. Une quinzaine de pays africains n’ont-ils pas figuré parmi les plus fortes croissances mondiales au cours de la dernière décennie ? Avec des taux annuels de 8 % à 10 %, ils rivalisaient avec les pays en développement du Sud-Est asiatique ![4]
Toujours est-il que, comme le constate Serge Michailof et Alexis Bonnel [2008], le niveau actuel du développement des pays du Sud résulte de leur mimétisme du modèle de développement économiques des pays du Nord, un modèle fondé sur la consommation des biens et ressources naturelles souvent à outrance.
L’Afrique dont l’économie reste très vulnérable semble n’avoir plus de choix, et le fait de ne plus avoir de choix rime avec misère et pauvreté comme le dit l’historien Joseph Ki-Zerbo : « La misère, c’est l’annulation du choix. Et actuellement en Afrique, les gens ont de moins en moins le choix ».[5]
En outre, les rapports qui tablent sur le développement en Afrique ne manquent pas. Dans son Rapport sur le développement en Afrique 2015, le Groupe de la Banque Africaine de Développement (BAD) fait un récapitulatif sur le développement de l’Afrique en faisant le lien entre croissance, pauvreté et inégalités. Le continent est généralement caractérisé par la famine, la guerre, la pauvreté extrême, la corruption, la fuite de capitaux, les inégalités avérées, l’instabilité politique (coups d’État), le génocide, l’analphabétisme, le terrorisme (comme pour compliquer davantage la situation). Selon le rapport sus-cité, si la pauvreté a plus ou moins reculé, les inégalités entre les couches sociales demeurent patentes[6]. À cela vient s’ajouter le chômage des jeunes. La BAD révèle que 29 millions de nouveaux entrants (plus ou moins compétents) arrivent chaque année sur le marché du travail en Afrique.
Quant à l’institution onusienne, en l’occurrence, le Programme de développement des Nations Unies (PNUD), elle pointe du doigt les disparités entre les genres qui coûtent à l’Afrique subsaharienne 95 milliards de dollars US par an[7]. Enfin, l’Africa Progress Panel (APP) pense avoir trouver le véritable problème du développement de l’Afrique. Dans son rapport annuel 2015 intitulé Global goals, African realities : Building a sustainable future for all, l’APP[8] avoue qu’il faut l’agriculture et la pêche pour un réel développement équitable en Afrique tout en tenant compte des énergies renouvelables dont l’Afrique regorge :
"Accelerating Africa’s transformation means significantly boosting its agriculture and fisheries, which together provide livelihoods for roughly two-thirds of all Africans. The time has come to unleash Africa’s green and blue revolutions. These revolutions could transform the face of the continent. Beyond the valuable jobs and opportunities they will provide, they can generate a muchneeded improvement to Africa’s food and nutrition security. More than anything, malnutrition on the continent is a failure of political leadership."[9]
L’on peut alors retenir que le développement des pays africains reste tributaire de moult facteurs pointés par les différents rapports et les économistes. Cependant, l’on peut s’intéresser à la manière dont les Africains eux-mêmes pensent le développement de leur continent.
Le développement de l’Afrique, vu par les Africains
Ignace Gnan [2010] dans son avant-propos affirme que « la plupart des intellectuels africains appréhendent les affaires de leur contient avec plus de réalisme que les non africains »[10]. Nous explorons alors la pensée de quelques-uns d’entre eux pour déterminer leurs points de vue sur le développement du continent africain.
De prime abord, on peut tenter de dire que certains pays africains sont caractérisés par la pauvreté voire l’extrême pauvreté, comme susmentionné. Certains programmes ou projets de développement, conçus en Occident et qui avaient pour objectif de sortir l’Afrique de l’ornière dans les années 80’ et 90’, ont fait long feu. Et pour des auteurs comme Samir Amin, « le développement et sous-développement constituent l’endroit et l’envers de la même médaille : l’expansion capitaliste »[11]. Cette vision s’inscrit dans le paradigme de la dépendance, développé par des intellectuels africains, selon lequel la pauvreté des pays du Sud n’est qu’une conséquence de la dépendance de ceux-ci vis-à-vis de ceux du Nord.[12] C’est pourquoi Joseph KI-ZERBO [2003] pense qu’ « on ne développe » mais plutôt qu’ « on se développe » et privilégie une approche endogène du développement en Afrique.[13] Selon lui, c’est à ce juste prix qu’on pourrait sortir l’Afrique de la pauvreté.
Ensuite, jusqu’au milieu des années 90, la notion de développement durable introduite va être considérée comme essentiellement « nordiste », d’où probablement la méfiance des pays du Sud face à l’enthousiasme de certains pays du Nord pour le développement durable. On peut relever en passant le rejet également du terme de l’écodéveloppement par les pays du Nord parce que le principal théoricien, Ignacy Sachs, l’avait conceptualisé avec les pays du Sud.
Si d’aucuns ont pu penser que la mentalité des Africains était prélogique, souffrant d’une tare congénitale, d’autres que l’Afrique était mal partie pour se développer, Essè Amouzou [2010], pour sa part, pense que c’est justement parce que « l’Afrique n’est pas partie d’elle-même » qu’elle en est à ce stade : « C’est l’Occident qui l’a poussée à partir contre son gré, en voulant lui imposer des modèles de développement à imiter. »[14] Dans la même dynamique, le même auteur [2009] pense que si « l’Afrique actuelle a du mal à s’accommoder du rythme économique imprimé au monde par les nations plus avancées »[15], c’est le fait que dans son passé elle avait une économie essentiellement basée sur la subsistance.
Pour Essè Amouzou [2010], les soi-disants experts en développement (responsables d’ONG), animés d’ « une volonté aveugle de progrès » pénètrent les milieux ruraux en touristes dont « les véritables mobiles sont d’escroquer les pauvres paysans et s’approprier injustement les fonds alloués au développement »[16]. Il précise que c’est pourtant le monde paysan qui nourrit les populations urbaines. D’après l’auteur, ces « apprentis sorciers » pour emprunter le terme à Serge Michailof, « organisent cette gestion des fonds en complicité avec les autorités locales dont les chefs de village et quelques individus influents »[17].
Selon Ignace Gnan [2010], les problèmes de l’Afrique se trouve essentiellement dans les mentalités de ses peuples :
"La plupart des problèmes africains ont leur origine dans la mentalité des Africains eux-mêmes. Surtout en Afrique noire, il est difficile aujourd’hui de parler de mentalités africaines, car on y trouve un peu de tout. Dans cette hétérogénéité, le négatif domine clairement le positif. Les valeurs comme le respect de la vie, l’amour du prochain, la solidarité, le sens profond de la vie communautaire, de l’éthique et de la morale, de la loyauté et de l’intégrité, etc. se font de plus en plus rares. Bien sûr tous les peuples ont leurs problèmes de mentalités d’une manière ou d’une autre. La seule différence est que les Africains ne font que régresser alors que les Occidentaux progressent, bien que ces derniers connaissent une détérioration des valeurs éthiques et spirituelles dans certains pays."[18]
Pour ce penseur, les Africains n’ont pas des objectifs clairs et nets qui puissent mobiliser leur énergie et à conjuguer leurs efforts : « Ils ne sont pas encore conscients de leurs intérêts communs mais sont prêts à s’entretuer pour des intérêts individuels, causes des divisions et des guerres fratricides. »[19] Ignace Gnan [2010] n’y va pas du dos de la cuiller pour accuser les Africains d’attendre, d’admirer et de singer les Occidentaux « sur lesquels ils ne prennent que les mauvais exemples, tandis que les bons restent invisibles »[20], en précisant que ceux-ci (les Africains) ont tous les atouts pour « se prendre et se faire prendre au sérieux ».
Selon toujours Ignace Gnan [2010], l’Afrique a des richesses énormes dans tous les domaines. Il suffit juste de rééduquer la masse, en commençant par les enfants : « Il faut expliquer aux enfants que la banane plantain cultivée sans engrais chimiques dans les plantations africaines est meilleure que la baguette fabriquée avec de la farine blanche, pauvre en éléments nutritifs »[21]. Pour lui, la reconversion des mentalités reste l’alpha et l’oméga dans tous les domaines de la vie. Il n’oublie pas les complexes d’infériorité développés par les Africains. Il en appelle ainsi à la responsabilité des politiciens africains qu’il accuse de manquer d’ailleurs de solidarité. Il en vient à dire que la misère des Africains est « due à la mauvaise gestion et à la mauvaise politique »[22]. Il va d’ailleurs renchérir en alléguant que le « sous-développement commence dans les têtes »[23] en appelant les Africains et les Africaines à changer eux-mêmes, à combattre « les fléaux » comme le tribalisme et le népotisme, l’analphabétisme et l’ignorance, la discrimination des femmes, la magie noire qui constitue une véritable négation du développement en Afrique[24].
D’autres penseurs africains ont apporté leurs contributions au débat. C’est ainsi que le chercheur Jean Magloire Somé, dans une interview accordée au journal lefaso.net en 2010 invite les Africains à se départir de l’idée selon laquelle le développement passerait par l’acquisition de milliards de francs et à sortir de la léthargie du stade de consommateurs :
"Il faut que les Africains sachent que le développement ne s’achète pas. Aujourd’hui en Afrique, on pense qu’il faut avoir des milliards de francs pour que le développement arrive [..] Le produit d’un créateur peut s’acheter, mais le génie de ce créateur ne peut l’être. Si vous vous maintenez à l’état de consommateurs vous resterez toujours à la traîne des autres. Il est temps que les Africains se réveillent. Il faut relancer la capacité de l’Africain à réfléchir par lui-même, investir son intelligence […] Pendant que nous restons là à dormir, à compter de l’argent, à compter des villas, à compter des voitures, les Occidentaux, eux, quittent chez eux pour venir, à notre nez, puiser dans cette science, améliorer ce qu’ils ont déjà créé pour venir nous les revendre. Tout cela parce qu’on refuse d’aller à la science."[25]
Enfin, le créateur du concept de l’utopie africaine de développement, Felwine Sarr à travers son essai Afrotopia publié en 2016 pense que « l’Afrique doit se réapproprier la capacité de nommer ses propres projets », le mot développement n’existant pas d’ailleurs dans plusieurs langues africaines. Pour celui-ci, « le développement est un mot-valise dans lequel on met toutes les aspirations vertueuses de l’humanité » et il implique un « retard des pays en développement par rapport aux pays développés, ainsi qu’un mimétisme, une voie toute tracée qui n’est pas la panacée ». Il propose alors de remplacer le mot développement par « bien-être », car « les aspirations au bien-être ont beau être universelles, les peuples peuvent y apporter des réponses différentes », le développement n’en étant qu’une forme. [26] L’Afrique n’a pas un retard à rattraper, rappelle Felwine Sarr et « l'utopie africaine consiste à frayer d'autres chemins du vivre ensemble »[27].
By Yéroséo Aris KUS. SOMDA
arisomda91@yahoo.fr
BIBLIOGRAPHIE
[1] Ignacy Sachs (citant Maurice Strong), 1997, L’écodéveloppement : stratégies pour le XXIe siècle, Paris, Syros, p.19
[2] Denis Cogneau in Philippe Askenazy, Daniel Cohen, op. cit., p127
[3] Ibid., p.129
[4] Alain Faujas, Christine Lagarde : « Pour éradiquer la corruption, mieux vaut traquer les tigres que les mouches », article de Jeune Afrique, publié le 21/0/2017 et disponible sur http://www.jeuneafrique.com/mag/402552/economie/christine-lagarde-eradiquer-corruption-mieux-vaut-traquer-tigres-mouches/
[5] http://boribana.over-blog.com/article-5170641.html (Blog Boribana, Réflexions sur le développement et l’humanité)
[6] Groupe de la Banque Africaine de Développement, Rapport sur le développement en Afrique 2015, croissance, pauvreté et inégalités : lever les obstacles du développement durable
[7] Rapport sur le développement humain en Afrique 2016 disponible sur http://www.undp.org/content/undp/fr/home/librarypage/hdr/2016-africa-human-development-report.html
[8] L’Africa Panel Progress (APP) est une fondation présidée par l’ancien secrétaire général de l’ONU, Kofi Annan, et qui réunit dix personnalités issues du secteur public et privé. Elle prône un développement équitable et durable pour l’Afrique
[9] APP, 2015, Global goals, African realities : Building a sustainable future for all, p.9 : « Accélérer la transformation de l'Afrique signifie dynamiser significativement son agriculture et les pêches, qui fournissent ensemble des moyens de subsistance pour environ les deux tiers des Africains. Le moment est venu de déclencher les révolutions vertes et bleues de l'Afrique. Ces révolutions pourraient transformer la face du continent. Au-delà des emplois et opportunités qu'ils offriront, ils peuvent générer l'amélioration de la sécurité alimentaire et nutritionnelle de l'Afrique. Plus que tout autre chose, la malnutrition sur le continent est un échec du leadership politique. »
[10] Ignace Gnan, 2010, Le développement en Afrique, Un devoir pour les Africains, Paris, L’Harmattan, p.9
[11] http://terangaweb.com/samir-amin-et-le-developpement-autocentre-2eme-partie/ (L’Afrique des idées, Samir Amin et le « développement autocentré » (2e partie)
[12] Gnambwemba Wendyélé Fabrice, Communication et promotion de l’éducation inclusive : cas de Handicap International dans la province du Kadiogo : mémoire de maîtrise en Sciences et Techniques de l’Information et de la Communication, option Communication pour le Développement, Département Communication et Journalisme, Université de Ouagadougou, année académique 2014-2015
[13] Joseph Ki-Zerbo, 2003, A quand l’Afrique, Paris, L’Aube, p.100
[14] Essè Amouzou, 2010, op. cit., p.7
[15] Essè Amouzou, 2009, L’Afrique, 50 ans après les indépendances, Paris, l’Harmattan, p.123
[16] Essè Amouzou, 2010, p.33
[17] Idem
[18] Ignace Gnan, 2010, Le développement en Afrique, Un devoir pour les Africains, Paris, L’Harmattan, p.15
[19] Ibid., p.16
[20] Ibid. p.17
[21] Ignace Gnan, op. cit., p.18
[22] Ibid., p.39
[23] Ibid., p80
[24] Le même auteur dans le même ouvrage pense que le « malheur de l’Afrique c’est que la magie noire (pure incarnation du mal), s’y trouve trop répandue » p.146
[25] Abdou Zouré, Jean Magloire Somé, chercheur socio-mathématicien : « L’animisme n’est pas une religion mais un concept scientifique », article posté le 07/02/2010 sur http://lefaso.net/spip.php?article34778
[26] In Idées pour le développement (blog de l’Agence Française de Développement) disponible sur http://ideas4development.org/developpement-revoir-terminologie/
[27] Pierre-Edouard Deldique, L’utopie africaine de Felwine Sarr, article publié le 25/03/2016 sur http://www.rfi.fr/culture/20160324-utopie-afrique-felwine-sarr-developpement-humanite-afrotopia-modernite-tradition
Pourquoi le ciel et la lune sont si loin de nous ???
Il était une fois un village où les habitants vivaient en parfaite harmonie avec le ciel et la lune. Il y régnait une atmosphère de Nirvanan. Le ciel était si proche qu’il suffisait d’étendre la main pour couper une partie et en faire cuire pour le repas du soir. Et la nuit venue, la lune si proche également, éclairait les sentiers du village sans pour autant éblouir.
Mais il y avait une règle à suivre au pied de la lettre : pour cuir cette partie du ciel qu’on coupait avec un long couteau, il ne fallait pas y ajouter du sel au risque d’en être privé à jamais.
C’est ainsi que le soir, tout le monde ingurgitait avec grand appétit des morceaux de ciel jusqu’à satiété. Et avec le clair de lune, on dansait et jouait. Cette vespérale apparition lunaire était ainsi synonyme de vitalité, de réjouissance mais aussi de rappel à cette règle d’or : ne jamais ajouter du sel, jamais !
Le train de vie allait si bien jusqu’au jour où la curiosité d’une femme, Gnètibèr, bouleversa l’ordre normal des choses. Elle s’était en effet posé cette question dans son for intérieur, sans en piper un mot à quelqu’un : « Et si je mettais du sel, est-ce que le ciel s’éloignerait vraiment ? » Voyez-vous comment un « si » peut entraîner comme conséquences, car « avec des si, on peut mettre Paris dans une bouteille » !!!
Et une après-midi, pendant que les hommes s’activaient au champ, Gnètibèr s’affairait à la cuisine comme d’ailleurs toutes les autres femmes du village, car le coucher du soleil ne devait point les surprendre en train de cuisiner toujours. Alors donc que Gnètibèr pilait le morceau du ciel dans un grand mortier, elle y ajouta discrètement du sel.
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Il y eut en ce moment même un tremblement de terre qui paniqua tout le village accouru instinctivement au cœur du village. Et soudain, une voix lugubre se fit entendre : « Je vous avais bien prévenu de ne point ajouter du sel, ne serait-ce qu’une pincée, quand vous viendriez à piler les morceaux du ciel. Mais Gnètibèr a enfreint à la règle. À partir de cet instant, le ciel s’éloignera à jamais de vous. De même que la lune de sorte que vous ne la verra qu’une seule fois dans le mois. Vous ne profiterez plus héla de vos activités du soir, parce que l’une d’entre vous à déroger à cette règle céleste et lunaire ».
C’est depuis lors que le ciel est si loin de nous ainsi que la lune. C’est également depuis lors que l’homme est obligé de travailler encore et encore pour sa pitance du soir, en espérant un jour revivre cette vie où la lune et le ciel s’unissaient merveilleusement pour le bonheur, ne serait-ce qu’éphémère, des hommes.
MORALE: On doit respecter les lois, qui plus est les lois de la nature. C'est aussi une leçon qui interpelle sur nos comportements envers l'environnement, thème que j'aborde à travers cette histoire. N'offensons pas l'environnement pour ensuite se mordre les doigts et dire: "Si je savais..." Malheureusement "Si je savais..." n'a pas de queue!
Y.Aris